dimanche 30 janvier 2011

Francis Vidil (chronique de concert)

Francis Vidil donnait ce soir du vendredi 21 janvier 2011 son habituel concert de nouvelle année à Versailles, dans la salle de concert décrépie du Conservatoire régional à rayonnement régional.
Un concert pédagogique
Des amis, des élèves, des admirateurs sont présents. Francis Vidil est professeur de piano et d'improvisation au conservatoire et - pédagogue doué - sa prestation est d'abord pour ses élèves. Un concert est un moment de pédagogie, auquel on vient pour admirer le maître, écouter une musique totalement improvisée, et parfois discerner de courtes dédicaces à telle ou tel sous forme de citations musicales ou de tics admirablement reproduits. Et surtout, c'est l'occasion de voir le Maître toucher le piano et composer à lui seul le programme et les morceaux.
Théâtre et musique
Comédien né, Francis Vidil aime également jouer avec un public fidèle et complice qui n’hésite d’ailleurs pas à lui donner la réplique ! Le Maître joue également avec le temps, laissant de grands moments de suspens, se faisant parfois (trop?) désirer.
Aucune redite, aucun effet préparé, tout est improvisation, y compris sa gestion du temps et des interventions orales, où l'on retrouve toujours un sens certain de l'humour.
Le don de savoir être "classique"
Et pourtant, il change. Francis Vidil devient "classique". A l'exubérance et aux pots pourris de l'improvisateur espiègle succède maintenant la musique d'un professeur de conservatoire assagi, où s'impose une technique maîtrisée. Illustration par ces improvisations "classiques", tout au long des deux premiers "sets", tout entiers placés dans une atmosphère romantique. Parmi les pièces les plus réussies de ce concert, un prélude de style Rachmaninov, bien construit (un peu trop long?), suivi d'une rhapsodie mêlant des styles manouches et orientaux. Le toucher est très puissant, le piano résonne formidablement et sans excès. Ce soir-là plus que les autres, Francis Vidil utilise assidûment les sons graves du grand piano Steinway, avec une insistance et constance telles que l'on en vient à regretter un rééquilibrage de tessiture... à moins que ce ne soit l'âge vénérable de l'instrument (20 ans) qui rende plus périlleux le jeu dans les aigus.
Une fin jubilatoire
A la fin des deux premières parties, pour les bis (ou le troisième "set"), voici revenu (mais nous avait-il vraiment quitté?) un Francis Vidil espiègle, convoquant à la fois Casimir, Mozart, la Panthère Rose et des grommellements à la Keith Jarreth sans oublier les sons de cloches d'église, dont il a fait sa marque de fabrique. L'improvisation devient alors débridée et le musicien si sérieux (en apparence?) redevient un grand enfant.

On se rappelle alors de son propos plein d'autodérision du début de concert : "Comme d'habitude je ne sais pas quoi faire". L'inspiration vient en improvisant, et c'est une démonstration maîtrisée que vient de nous faire Francis Vidil.


(photo : avec l'autorisation de Francis Vidil)